Les obstacles de la femme entrepreneure
En dehors de ces difficultés rencontrées à titre général, il y a bien sûr celles liées à la condition de femme. Lorsque je demande à Nancy de m’entretenir là-dessus la réaction est immédiate. Ma fléchette a touché la cible. « Ehhhhhh. Par où je commence ? », dit-elle. Et moi, de sourire, parce que comprenant la profondeur du mal. « Combien de fois entre nous femmes entrepreneures nous ne nous sommes pas assises ou appelées pour discuter de ça, parce qu’on est frustrées ?»
Eh oui ! Etre femme entrepreneure et surtout jeune comme Nancy c’est faire face à plusieurs maux : complexe d’infériorité ou de supériorité des hommes, irrespect de l’autorité surtout de la part des employés masculins ou plus âgés ; diminution des efforts de la femme entrepreneure (ce qui l’emmène à travailler deux fois plus), intention biaisées des partenaires (surtout lorsqu’on est choco comme Nancy).
«Dès qu’on découvre mon âge on se dit ah ! Soit elle a des parents riches, soit elle a un sugar daddy. Il y a des hommes, pendant un rendez-vous d’affaire qui commencent à me draguer ! Moi je suis là pour gagner mon pain ! J’ai horreur de ça !» Arrêtez vos tentatives de dragues messieurs ! Nancy n’est même pas un cœur à prendre.
Bien sûr dans ces conditions sa jeunesse ne vient pas arranger les choses. Mais elle sait malgré tout se faire respecter tout en respectant, remettre chacun à sa place au prix de licenciement s’il le faut. « Il ne faut pas avoir peur d’affirmer son autorité… On a pas besoin de manquer de respect pour affirmer son autorité. Tout ceci est un combat mais je pense que ça se travaille et ça forge le caractère.
Ce qui est bien avec nous les femmes c’est que dès que nous sommes convaincues de qui on est, on n’a pas besoin de parler. Dès que tu rentres dans la pièce, on sait tout de suite qu’elle n’est pas venue comme on dit au Canada, »niaiser ». Je nous félicite nous les femmes, quelque soit le domaine dans lequel nous exerçons. Ce n’est pas facile.».
Nous en sommes d’ailleurs venues au sujet de la journée internationale des droits de la femme, le fameux 8 Mars. Ce qui est effarant c’est que beaucoup de femmes elles-mêmes ne se rendent pas compte de la signification de cette journée et de ce que ça implique réellement.
Ceci est déjà un problème, car beaucoup reçoivent encore des messages du genre « bonne fête de la femme, ou des mamans », que sais-je encore, et ne réagissent pas. Résultat : la signification de cette date est travestie et on se perd encore une fois dans des considérations erronées ou d’ordre commercial qui n’ont aucun rapport avec le vrai combat. C’est dommage ! Nancy explique : « J’ai des amis qui m’ont dit profitez-en hein. C’est votre journée. Demain c’est fini. Mais non ! Il n’est pas question de parler des droits de la femme que le 8 Mars. C’est un vrai problème de société.».
Tout ceci c’est bien sûr sans compter que Nancy n’a pas encore de progéniture. En effet, il faut dire en passant qu’il réside chez la femme active en général un désavantage énorme par rapport à la répartition de l’énergie, surtout pour celles ayant déjà des enfants ou un foyer.
Les rôles d’éducation des enfants et de tenue du foyer étant naturellement assurés par la femme, son activité ne l’exempte en rien. Elle s’assigne toutes les tâches et doit les assumer au mieux. Ce qui constitue une autre difficulté partagée par toutes. Pourtant elle garde la même force et continu d’avancer. C’est juste remarquable !
Tout compte fait, il faut donc un sacré caractère pour être jeune femme et entrepreneure chez nous. Et ceci Nancy l’a compris. Et parlant de caractère, elle avoue être têtue et perfectionniste. Un sacré mélange explosif qui peut constituer une faiblesse. « Si je m’écoutais, je n’aurais pas encore ouvert. Je pense que les personnes destinées à entreprendre ou à réaliser de grandes choses ont en commun cette maladie. Mais il faut doser les choses… »
Le bilan de Nancy
Aujourd’hui, l’entreprise de Nancy a un bilan qui la contente au-delà de ses attentes. Elle s’était donné dix à quinze ans pour atteindre certains objectifs, mais déjà en quelques mois elle est plutôt satisfaite de ce qu’elle a pu réaliser. Et même si elle dit que Dieu en a tout le mérite, il n’en demeure pas moins que ses efforts ont payé également. Certes la route est encore longue, elle projette de plus grandes choses pour ses affaires, mais elle apprend à se réjouir des victoires, aussi petites soient-elles.
« Si je dois donner un conseil à ceux qui veulent entreprendre, il est vrai qu’il faut s’accrocher à la vision mais aussi, avoir des objectifs et les atteindre permet de se motiver.» .
Elle trouve sa force en sa créativité, ses atouts en esthétique, sa foi et sa nouvelle relation avec Dieu qui lui a permis de se rééduquer. « Je n’ai pas honte de le dire, j’étais ambitieuse mais très paresseuse.».
En termes de stratégie de communication, Clara Cosmétics est pour l’instant visible principalement sur les réseaux sociaux et s’en contente. Ambitieuse, Nancy penser déjà à s’exporter ailleurs. La Boite à Macarons est en ce moment disponible uniquement à Lomé, mais notre entrepreneure voit sa marque dans quelques années connue en Afrique. Cette année, Nancy lancera une nouvelle marque de produits cosmétiques pour soins naturels faits à Lomé par des procédés ancestraux.
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Il ne suffit jamais d’avoir une idée d’entreprise. Le fait est qu’il faut combler un besoin, avoir un mental d’acier, être endurant, s’entourer des bonnes personnes, savoir saisir des opportunités, être discipliné et suivre une vision pour ne citer que cela. Nancy-Lynn d’ALEMEIDA est bien la preuve comme beaucoup d’autres femmes dans le domaine de l’entrepreneuriat que la jeunesse et la condition féminine n’est pas un frein à la réussite de son projet.
Une pensée spéciale à toutes celles qui sont dans ce combat, et à tous les hommes qui soutiennent leurs efforts et les respectent.
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