Une étude nord-américaine détaille les motivations derrière ce nouveau type d’agression visuelle envoyée à des destinataires non-consentantes.
«Quand je reçois un dickpic (photo de pénis) je ressens du dégoût et de la surprise, explique Clémentine, et dans un cas j’ai eu un tel rejet que j’ai balancé mon téléphone au travers de la pièce.»
Le plus étonnant, comme l’a constaté une étude scientifique nord-américaine, c’est que beaucoup d’hommes sont persuadés que cela excite, malgré elles, leurs destinataires non consentantes. Si on laisse de côté les échanges consensuelles d’images lors de jeux érotiques, la première chose à retenir est que l’envoi non désiré de ce type de photo est interdit par la loi en France.
«Des dickpics non sollicitées peuvent être situées dans le continuum de la violences sexuelle», expliquent en effet Flora Oswald (université de Pennsylvannie) et ses collègues psychologues canadiens de l’University of British Columbia et de la Kwantlen Polytechnic University dans une étude qui vient d’être publiée dans The Journal of Sex Research.
Des motivations très surprenantes
Les chercheurs ont analysé les réponses de 1087 hommes recrutés parmi des étudiants, sur des réseaux sociaux et via un système de sondages en ligne, pour essayer de comprendre les fondements de ce type d’agression. La moitié d’entre eux reconnaissait avoir déjà envoyé des dickpics non sollicités! L’originalité de l‘étude est surtout d’avoir demandé aux hommes interrogés, dont l’âge allait de 16 à 75 ans (en moyenne 30-33 ans), de répondre à des questionnaires évaluant notamment leur sexisme et leur narcissisme. Sans surprise, les hommes qui envoient des dickpics non sollicités sont plus sexistes et plus narcissiques que les autres.
Mais le plus hallucinant est l’inventaire des motivations des agresseurs (plusieurs réponses possibles pour chaque personne interrogée).
D’abord, la croyance que cela peut séduire une femme ! Un tiers l’a fait «dans l’espoir que la personne voudra avoir une relation sexuelle» et la moitié «dans l’espoir de recevoir le même type d’image en retour». Un expéditeur sur deux le fait dans le but «d’exciter la destinataire» ou pour «manifester son attirance sexuelle pour quelqu’un». Un agresseur sur cinq considère d’ailleurs que «c’est une façon normale de flirter» ou qu’«en envoyant suffisamment quelqu’un finira par répondre favorablement».
Une expression parfois misogyne
Un sur quatre le fait car il est «fier de l’aspect de (son) pénis et veut le partager avec d’autres» ou parce qu’«envoyer des photos de son pénis l’excite». Un sur dix car il «n’a pas confiance dans l’aspect de son pénis et espère que quelqu’un va répondre positivement pour booster (son) estime de soi».
Quelques expéditeurs (7%) «aiment l’idée de mettre en colère quelqu’un contre qui ils sont en conflit» ou «apprécient le pouvoir de forcer quelqu’un à regarder (leur) pénis sans son consentement», et, 5% «n’aiment pas le féminisme, et envoyer des photos de pénis est une façon de punir les femmes qui essayent de prendre le pouvoir aux hommes».
Les auteurs de l’étude mettent en garde contre la généralisation de leurs résultats obtenus auprès de volontaires et qui n’incluent pas la diversité des orientations sexuelles. Ils estiment par ailleurs qu’il manque d’études sur l’expérience vécue par celles qui sont victimes de ce type d’agression.
Que faire en pratique si on reçoit ce type d’image ? «Ne pas effacer l’image, la conserver, et aller au commissariat», conseille l’avocat Emmanuel Pierrat, auteur de «Le sexe et la loi» (La Musardine, 2019). Il rappelle que c’est illégal en France: «On peut même envisager trois qualifications possibles: la diffusion de message à caractère pornographique, l’exhibition sexuelle et le cyber-harcèlement», explique-t-il au Figaro.
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